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Plusieurs études traitant de la précarité alimentaire ont été publiées entre septembre et novembre 2024. Pour commencer, un rapport de l’Institut Montaigne montre que l’alimentation est le reflet des inégalités socioéconomiques : plus le revenu est faible plus l’alimentation représente une part importante du budget et plus les produits frais sont remplacés par des produits de moindre qualité nutritionnelle.[1]
Selon les auteurs, il est nécessaire de conduire des réflexions concertées entre pouvoirs publics, industriels, distributeurs, restaurateurs et consommateurs afin d’élaborer des politiques alimentaires tenant compte à la fois de leurs impacts sociaux, sanitaires et environnementaux (réduction de l’empreinte environnementale et climatique).
Focus : La précarité alimentaire en Afrique
La précarité alimentaire demeure l’un des défis les plus urgents et complexes auxquels le continent africain est confronté. Malgré les avancées dans certains secteurs, une grande partie de la population continue de souffrir d’insécurité alimentaire chronique. Ce problème, profondément enraciné dans des facteurs économiques, climatiques et politiques, nécessite une attention soutenue et des solutions durables.
Une situation alarmante
Selon le *Rapport mondial sur les crises alimentaires 2023*, environ 140 millions de personnes en Afrique subsaharienne sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë. Cette situation est exacerbée par une combinaison de facteurs, notamment les conflits armés, les changements climatiques, la croissance démographique rapide et les faiblesses structurelles des systèmes agricoles. Ces éléments s’entrelacent pour créer un cercle vicieux de pauvreté et de faim.
En France, une recommandation est également formulée par le rapport élaboré par le Secours catholique – Caritas France, le réseau Civam, Solidarité Paysan et la Fédération des diabétiques.[2] Selon eux, le prix de l’alimentation cristallise les tensions du système alimentaire, qui doit concilier différents objectifs contradictoires : accessibilité sociale, durabilité, juste rémunération des producteurs, etc.
Le document rappelle l’estimation de 8 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire, parmi lesquelles 2 millions ont recours à l’aide alimentaire. Par ailleurs, le nombre de diabétiques a augmenté de 160 % entre 2001 et 2022, et les dépenses de santé publique liées à l’obésité et au diabète s’élèvent à 11,7 milliards d’euros (2022).
Les impacts des conflits et des déplacements
Les conflits armés sont l’une des principales causes de la précarité alimentaire sur le continent. Des régions comme le Sahel, la Corne de l’Afrique ou encore l’Est de la République démocratique du Congo subissent des violences prolongées qui perturbent les systèmes agricoles et les chaînes d’approvisionnement.
Les déplacements massifs de populations dus à ces conflits aggravent la situation, rendant l’accès à la nourriture encore plus difficile pour les communautés vulnérables.
Le défi climatique
L’Afrique est particulièrement vulnérable aux impacts du changement climatique, bien qu’elle contribue très peu aux émissions mondiales de gaz à effet de serre. La fréquence accrue des sécheresses, des inondations et d’autres phénomènes climatiques extrêmes affecte gravement les récoltes et réduit la disponibilité des ressources en eau. Par exemple, la sécheresse prolongée dans la Corne de l’Afrique a laissé des millions de personnes sans accès à une alimentation suffisante.
Une agriculture sous pression
Malgré le fait que l’agriculture emploie près de 60 % de la population active en Afrique, le secteur reste largement sous-développé. Une faible mécanisation, un accès limité aux intrants agricoles (comme les engrais et les semences améliorées) et un manque d’investissement dans les infrastructures rurales freinent la productivité.
Par ailleurs, les petits exploitants agricoles, qui constituent l’épine dorsale de la production alimentaire en Afrique, sont souvent laissés pour compte dans les politiques publiques.
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Les conséquences sociales et économiques
La précarité alimentaire ne se limite pas à l’absence de nourriture ; elle a des répercussions profondes sur le développement humain et économique. La malnutrition chronique chez les enfants entraîne des retards de croissance et une diminution des capacités cognitives, compromettant ainsi leur avenir. Sur le plan économique, les pertes de productivité dues à la faim coûtent des milliards de dollars chaque année aux économies africaines.
Des solutions pour un avenir durable
Face à ces défis, plusieurs approches doivent être envisagées pour réduire la précarité alimentaire en Afrique. Voici quelques pistes prioritaires :
Renforcer la résilience face au climat
Il est essentiel d’investir dans des pratiques agricoles résilientes au climat, telles que l’agroécologie et l’irrigation durable. Par ailleurs, le développement et la diffusion de variétés de cultures résistantes à la sécheresse peuvent aider les agriculteurs à s’adapter aux conditions climatiques changeantes.
Encourager les investissements dans l’agriculture
Les gouvernements africains et leurs partenaires internationaux doivent augmenter les investissements dans le secteur agricole. Cela inclut la construction d’infrastructures rurales (routes, systèmes d’irrigation, entrepôts), l’accès au crédit pour les petits agriculteurs et le soutien aux coopératives agricoles.
Promouvoir la paix et la stabilité
La résolution des conflits est un préalable indispensable pour garantir la sécurité alimentaire. Les efforts diplomatiques régionaux et internationaux doivent être intensifiés pour instaurer une paix durable dans les zones touchées par les violences.
Renforcer les filets sociaux
Les programmes d’aide alimentaire ciblée, combinés à des initiatives telles que les transferts monétaires conditionnels ou inconditionnels, peuvent offrir un soutien immédiat aux populations les plus vulnérables tout en stimulant l’économie locale.
Cas de la France
Dans une note, l’Institut Rousseau reprend de son côté l’idée d’un « droit à bien manger » et de l’instauration d’une sécurité sociale de l’alimentation[3]. Une quarantaine d’organisations regroupées dans un collectif national portent cette proposition. Un article de la revue L’Économie politique décrit les principes de fonctionnement d’un tel régime de protection, qui supposerait la création d’une branche dédiée de la sécurité sociale.[4]
Dans un rapport commandé par la Fondation Jean Jaurès, L. Cantuel (responsable du pôle institutionnel et stratégique aux Restos du Cœur) rappelle l’importance de l’aide alimentaire pour lutter contre la pauvreté.[5]
Il présente aussi des alternatives à cette aide : chèque alimentaire (aide monétaire pour l’achat de produits alimentaires) et sécurité sociale de l’alimentation, sur laquelle il porte quant à lui un regard critique. Il s’interroge en effet sur le coût de ce dispositif et sur ses potentielles limites, en particulier l’exclusion de personnes non affiliées à la sécurité sociale et pourtant aujourd’hui bénéficiaires de l’aide alimentaire.
Conclusion
La précarité alimentaire en Afrique est un problème multidimensionnel qui exige des réponses tout aussi complexes. Si des progrès notables ont été réalisés dans certains pays, il reste encore beaucoup à faire pour garantir que chaque Africain ait accès à une alimentation suffisante et nutritive. La collaboration entre les gouvernements, les organisations internationales, le secteur privé et la société civile sera essentielle pour relever ce défi collectif.
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Sources :
[1]https://www.institutmontaigne.org/publications/fracture-alimentaire-maux-communs-remede-collectif
[2] https://www.civam.org/ressources/thematiques-groupes/alimentation-thematiques-groupes/linjuste-prix-de-notre-alimentation-quels-couts-pour-la-societe-et-la-planete
[3]https://institut-rousseau.fr/vers-une-securite-sociale-de-l-alimentation
[4]https://shs.cairn.info/revue-l-economie-politique-2024-4-page-77?lang=fr
[5]https://www.jean-jaures.org/publication/faut-il-en-finir-avec-laide-alimentaire

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